Amours Puissance Haine

Extrait:

 « Nous offrons une parole vraie à ceux pour qui nous avons de la considération, de l’estime, de l’amour… Aux autres, nous mentons. Lorsque nous mentons à ceux qui nous aiment, nous les broyons. Ce mensonge-là est un meurtre. »

                 Après plus d’un an sans nouvelles de Lui, je n’espérais plus en recevoir. Je l’avais presque oublié – pour autant qu’on puisse enfouir dans le terreau de sa mémoire l’image de celui qui a incarné le grand Amour, qui s’écrit avec une majuscule.

                Le tableau noir avait été réduit à un aide-mémoire commun pour l’approvisionnement courant et les factures à régler en temps et en heure, à la satisfaction des besoins, orphelin des mots de Lui et du désir qu’ils véhiculaient. Ou du mépris qu’ils inspiraient à Hugues.

                J’ai relu trois ou quatre fois sa lettre là où Lui eût aimé que je la lise, dans la bibliothèque où il se réfugiait pour se soustraire à l’omniprésence  « d’amis » qui venaient trop souvent rompre notre intimité. A la compagnie de ces « amis », Lui préférait celle des livres et de leurs auteurs. La bibliothèque était interdite (elle l’est toujours) à ceux qui n’y étaient pas invités, et Lui n’y conviait rarement d’autres que moi à partager ses lectures. Nous avions envisagé de sanctifier cette pièce, et nous nous étions amusés avec cette idée que la bibliothèque pût être un sanctuaire, comme la Méditerranée en est un pour les baleines.